Les Alfers namurois au Népal ! Partie 1/12 - Arrivée à Katmandou

Les Alfers namurois au Népal ! Partie 2/12 - Découverte de Katmandou

Les Alfers namurois au Népal ! Partie 3/12 - Inauguration du 12ème International Folk Festival Nepal à Katmandou

Les Alfers namurois au Népal ! Partie 4/12 - Un voyage infernal !

Les Alfers namurois au Népal ! Partie 5/12 - Le fabuleux accueil de Ghorahi !

Les Alfers namurois au Népal ! Partie 6/12 - Lumbini, lieu de naissance de Bouddha.

Les Alfers namurois au Népal ! Partie 7/12 - Une journée à Pokhara

Les Alfers namurois au Népal ! Partie 8/12 - L'émouvante rencontre avec l'Himalaya



Un voyage au Népal, avec les Alfers namurois ! JOUR 8

Sur l'invitation du Everest Nepal Cultural Group, le groupe folklorique des Alfers namurois s'est rendu au Népal pour participer au douzième Festival International de Danse Folkorique Népal (https://www.folkfestivals.org.np), qui eut lieu à Katmandou, Ghorahi et Pokhara du 01 au 10 mars 2024.

Jeudi 07 mars 2024. Pokhara, 4h00 du matin. Rarement la sonnerie d'un réveil n'aura été aussi attendue.

Il ne serait pas exagéré de dire que j'espérais ce matin depuis plus de quarante ans.

Préambule. Les lecteurs et lectrices les plus perspicaces n'auront pas manqué de remarquer que mes prénoms et noms ne sont pas très belges.

En effet, même si ma chère mère est belge, même si je suis né en Belgique et en porte la nationalité ainsi qu'une grande part culturelle, mon regretté père était natif d'un petit village calabrais, au fin fond de l'Italie, niché sur un flanc de montagne du massif de l'Aspromonte, qui culmine à près de 2000m d'altitude.

À seulement 4 km à vol d'oiseau de la mer, le coin est surnommé, le "balcon sur le Détroit de Messine", la vue plongeante y étant incroyablement belle sur le détroit en question, qui sépare l'Italie et la Sicile d'un fin et profond bras de mer, et sur lequel courants et vents violents dessinent mille nuances de bleu marine. Depuis le village, on voit clairement au loin l'Etna et les îles Eoliennes. C'est beau, très beau vous dis-je, d'une beauté sauvage et violente telle que le lieu aura inspiré la mythologie grecque, dont Homère dans sa narration de l'Odyssée d'Ulysse. ( Charybde et Scylla )

J'ai eu le bonheur de passer plusieurs semaines par an dans ce village, chaque été de mon enfance et adolescence, auprès de mes tout autant regrettés grand-parents paternels. Ces étés heureux m'ont vu crapahuter sans arrêts sur les flancs jaunis par la sécheresse de ces jeunes montagnes calcaires.

De toutes ces années à goûter aux joies des pentes raides couvertes d'oliviers et de pins, de ces falaises blanches et friables où les fossiles marins affleuraient, et peut-être un peu à cause de ce sang montagnard qui coule en partie dans mes veines, les hautes cîmes auront toujours exercé sur moi un irrésistible pouvoir d'attraction. Pas la montagne artificialisée des sports d'hiver et ses remontées mécaniques, mais la montagne brute que l'on arpente lentement par des sentiers étroits et vertigineux, découvrant pas après pas de nouveaux angles de vue sur son monde minéral.

Marcher en montagne est l'une de mes plus simples définitions du bonheur. J'ai par exemple passé près d'une année, jadis, au pied du massif du Vercors, imposant contrefort des Alpes, à en explorer et photographier amoureusement flancs et sommets.

Si je vous développe tous ces détails, c'est pour que vous compreniez à quel point la montagne est inscrite dans mon ADN. Et quand on rêve de montagne, quoi de plus logique que de fantasmer sur l'Himalaya ?

Nous parlons ici de l'une des raisons qui m'ont poussé à postuler à l'offre des Alfers namurois : avoir enfin l'opportunité de contempler les hauts sommets himalayens de mes propres yeux. C'est important, pour un photographe, de voir avec ses propres yeux...

Alors, quand les organisateurs du 12ème International Folk Festival Nepal nous ont annoncé une virée matinale face à des géants de roche et de glace, c'était la promesse de la satisfaction de l'un de mes plus vieux rêves de gosse.

5h du matin, les Alfers et tous les groupes folkloriques du festival sont en route dans d'antiques mini-bus. Pokhara dort encore, mais nous sommes excités par cette expédition peu commune. Nous avons malheureusement du laisser notre pauvre Marc à l'hôtel, terrassé à son tour par le virus qui m'avait attaqué deux jours plus tôt. Je n'en mène pas encore bien large physiquement, mais mon corps a produit l'adrénaline nécessaire face à cet événement tant attendu : ce matin, je pourrais déplacer des montagnes :-) !

Direction Sarangkot, sur les hauteurs du nord de Pokhara. Tout en haut de ce village perché à plus de 1500 mètres d'altitude, une tour et une immense terrasse offrent l'une des vues les plus spectaculaires sur une partie des plus hautes montagnes de notre planète.

Le moteur du bus hurle ses efforts mécaniques dans la nuit noire et les virages serrés. Les milliers de petites lueurs de la ville deviennent plus petites à mesure que nous grimpons. On voit l'aube et ses teintes chaudes orangées annoncer la fin de la nuit.

5h30 du matin, nous descendons des bus et arrivons au pied d'une longue pente raide, dont les escaliers tout aussi verticaux, et aux marches irrégulières, se sont vus assaillis par une horde internationale, essoufflée par l'effort, et par l'excitation de l'extraordinaire spectacle promis au sommet. Il y a de la tension dans l'air chez les responsables du festival : il faut se hâter d'atteindre le plateau sommital avant que les premiers rayons du soleil n'embrasent les hauteurs enneigées des montagnes.

J'ai fini les dernières marches en courant (l'exercice physique régulier aide pour le cardio )... Dimitri y était déjà (lui aussi fait du sport ). Nous sommes arrivés ensemble sur le point de vue, parmi les premiers.

La nuit est finissante. Devant nous se dresse un monstre de pierre et de glace, qui du haut de ses 6995 mètres, superbe pyramide aux parois verticales en forme de Cervin géant, domine une part importante de mon chant de vision. Un filet de nuage glisse de son sommet vers la droite, emporté par des vents qui doivent rugir toute leur force glacée, là haut.

Le Machapuchare aura été le premier pic Himalayen à s'offrir à mon regard, comme une ombre chinoise monumentale. La symbolique est intéressante, puisqu'il s'agit de l'un des sommets himalayens les plus sacrés, demeure de Shiva (le dieu hindou au trident et à la peau bleue) dont l'ascencion est interdite et qui n'a, officiellement et jusqu'à présent, jamais été gravi par des humains. À sa droite, un autre monstre un peu plus éloigné mais haut de 7937 mètres me nargue calmement, c'est l'Annapurnna II, juste à côté de l'Annapurnna V (7525 mètres). De part et d'autres, à peine visible dans l'aube naissante et les nuages qui squattent les hauteurs, l'Annapurnna I (8091 mètres) et le Manaslu (8163 mètres).

Nous ne sommes qu'une poignée de personnes sur place à ce stade. Je sens une bouffée incontrôlable d'émotions et je m'éloigne vite dans un coin. En silence, j'ai pleuré toutes les larmes de mon corps, en contemplant les toits du monde dans l’aube naissante. Un moment de béatitude brute et brutale. Assurément l'un de ces moments où l'existence ne laisse aucune place à la moindre arrière pensée, et où chaque larme est une soupape qui aide le corps à canaliser ce bonheur absolu. Un moment rare, très rare dans une vie humaine. Un de ces instants qui, selon la formule consacrée, restera gravé dans ma mémoire jusqu'à mon dernier souffle.

Après les Aurores Boréales, vues et photographiées pour la première fois de ma vie dans l'extrême nord suédois et norvégien 3 semaines plus tôt (promis, je vous en parlerai bientôt!), un autre rêve d'enfant est exaucé. Cette année 2024 débute fort !

En quelques minutes les nuages qui surplombent le sommet du Manaslu s'embrasent et se teintent d'une couleur orange, qui contraste fortement avec le fond du ciel bleu sombre. Ah, le bon usage des couleurs complémentaires : le directeur de la photographie de ce lever de soleil est décidément très efficace ;-) .

Puis, rapidement, les sommets des monstres qui nous font face s'embrasent à leur tour. Le jour finit par se lever complètement, dévoilant tous les détails de ce paysage XXL, sous les yeux émus des participants du festival. Un magnifique moment de partages entre nous toutes et tous !

Merci aux Alfers namurois et à l'Everest Nepal Cultural Group, qui organise l'International Folk Festival-Nepal de m'avoir permis de vivre ce moment.

Fred bat le record de hauteur de lancer de drapeau en le projetant symboliquement plus haut que le Machapuchare (https://youtube.com/shorts/OQtD5JrGd9A?feature=shared). Prenez ça, les Suisses ! (il paraît que c'est un private joke de lanceurs de drapeaux, une blague d'initiés en somme). Il n'empêche que l'image, et la vidéo, de ce drapeau belge volant face à l'Himalaya vaut son pesant de cacahuètes.

Après un peu plus d'une heure passée à contempler les forces telluriques en action (certes, l'exercice requiert un certain effort d'imagination), il est temps de rejoindre les mini-bus pour rentrer à l'hôtel et prendre le petit-déjeuner. J'aimerais rester encore et encore. J'hésite un instant à me rouler par terre en hurlant et en pleurant, comme un enfant-roi qui fait une crise au supermarché, mais je me dis que cela ne fonctionnerait sans doute pas. Il faut se montrer raisonnable, parfois.

Après le petit-déjeuner, nous partons visiter une grotte (Gupteshwor Mahadev Cave) et une chute d'eau (Devi's Fall Pokhara), en périphérie de la ville, tous deux appartenant au même réseau karstique. La descente vers la grotte est très intéressante, serpentant dans un escalier en spirale, orné d'une multitudes de divinités hindoues. C'est un nouveau moment de rires et d'échanges comiques avec nos amis et amies népalais et indiens, avec qui nous faisons ces visites. Ce voyage est une excellente expérience de partages inter-humains !

Je zappe une dernière visite, d'un célèbre temple bouddhiste qui surplombe Pokhara : j'ai besoin de prendre un peu de repos avant la nouvelle longue route qui nous attend cet après-midi et soir.

Le trajet entre Pokhara et Katmandou, ne fait que 200km environ, entièrement en montagne. Un trajet qui ne nous prendra qu'une dizaine d'heures. La route est entièrement en travaux sur toute cette distance. Une sorte d'immense autoroute, une 4 bandes est en construction. Un tronçon, qui fait à peine quelques maigres kilomètres, est presque terminé, laissant imaginer le résultat final. Ce sera bien, quand ce sera fini. Mais ouvrir un chantier étalé sur une telle longueur laisse craindre le pire en matière de délais d'exécution...

Marc est au bout de sa vie, souffrant le martyr entre la fièvre et les nausées. Mon état est à peine meilleur, le pic est passé de mon côté, mais cela reste compliqué.

Notre chauffeur, tout sourire, continue de dépasser et frôler les camions, scooters, voitures et autres autobus comme si nous transportions un organe dans un sac de glace à livrer de toute urgence, pour un patient en attente d'une transplantation. En dépit de toute règle élémentaire de prudence, il entame des dépassements désespérés, alors que des véhicules de 15 tonnes arrivent, 100 mètres en face de nous, et nous font des appels de phare en freinant brutalement ou en faisant un écart pour éviter le frontal. S'il continue comme ça, nous serons bientôt tous et toutes des donneurs d'organes... Je craque, et demande à nos accompagnateurs népalais de lui parler, qu'il ralentisse ce fichu rythme et nous laisse une chance d'arriver vivants à Kathmandou. Je n'ai pas la conviction d'une survivance de l'âme, et n'ai aucune envie de partager une brutale, mais évitable, fin de voyage existentielle en sa compagnie. Le message semble être passé : il dépasse avec un peu moins de hargne et lève (un peu) le pied...

Au-delà de cette manière de conduire qui fait un pied de nez à la vie (le Népal a un taux de mortalité sur les routes par 100.000 habitants 3 fois plus élevé qu'en Belgique), cette longue étape confirme le sentiment laissé par les 800 autres kilomètres parcourus ces derniers jours. Le pays est un immense chantier, et l'investissement sur l'interconnection entre les villes est évident. C'est en effet un pays où le réseau routier est peu développé, la topologie n'aidant bien sûr pas, celle-ci empêchant d'ailleurs la construction d'un réseau ferroviaire. Nous nous interrogeons sur le financement de ces énormes travaux. L'aide internationale intervient, le gouvernement népalais également. La Chine en paie une partie non négligeable. Il apparaît, en faisant quelques recherches, que l'armée népalaise est chargée de la réalisation des travaux, via des sous-traitants.

23 heures, nous sommes enfin de retour au Yellow Pagoda Hotel de Katmandou. Comme l'impression de revenir à la maison. Tiens, la salle où nous prenions toutes et tous nos repas, 4 jours plus tôt s'est transformée en ... parking de scooters !

Nous verrons ça demain.

Enfin, dormir !

Sources :
https://fr.wikipedia.org/wiki/Liste_des_pays_par_taux_de_mortalit%C3%A9_routi%C3%A8re#:~:text=2%20pour%20100%20000%20%C3%A9quivaut,%C3%A9quivaut%20%C3%A0%20650%20par%20million.&text=D'
https://www.altitude.news/himalaya/2022/01/08/routes-nepal-construites-chine-impact/
https://www.donneesmondiales.com/asie/nepal/trafic.php
https://kathmandupost.com/national/2023/12/24/the-many-roadblocks-to-timely-completion-of-expressway



Photographies de Pino Romeo. Aucun usage des photographies n'est autorisé sans l'accord de l'auteur
© 2024 - Pino Romeo


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BONUS VIDEO (soyez indulgents, je ne suis que photographe et non vidéaste ;-) ) :



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